Tout en continuant à étudier l’évolution de la Justice Militaire durant le conflit 14/18, Prisme «glisse» entre 2 articles de fond, des cas individuels comme celui du soldat Huchet.
Ce cas a demandé du temps pour être exploité. Nous avons découvert son existence quand nous avons pu accéder aux archives du Ministère de la Justice en particulier les recours en grâce, ces archives étant inaccessibles car dans un local comportant de l’amiante, puis à cause de l’affaissement du bâtiment d’accueil du public des Archives Nationales de Fontainebleau.
Nota : toutes les captures d’images non sourcées présentées dans cet article sont issues soit de MDH/SHD dossiers fusillés, soit du dépôt central d’archives de la Justice Militaire, les autres documents sont sourcés. Les phrases en italique sont la copie exacte des documents originaux quelle que soit leur apparence.
C’est un dossier volumineux de 2 jugements comportant 249 pièces, signe reconnaissable des jugements de Conseil de Guerre permanent en temps de guerre. C’est un cas atypique que nous ne pensions pas trouver au cours de cette période, enfin....mais c’est le seul connu à ce jour ; nous avons maintenant la confirmation que d’autres soldats ont agi de la sorte.
L’état signalétique et des services de ce militaire nous apprend qu’il a été incorporé au 31ème régiment d’infanterie à dater du 16 novembre 1896, nommé caporal le 26 septembre 1897, il est passé dans la réserve de l’armée d’active le 1er novembre 1899, certificat de bonne conduite accordé. Le 1er août 1914, il est appelé par ordre de mobilisation générale au 28e régiment territorial d’infanterie. Il n’a ni citation, ni blessures.
Dans le dossier 186 S 20 des archives de Ministère de la Justice, on apprend que le 20 janvier 1920, le Président de la République n’a pas accueilli le recours en grâce du soldat Huchet du 28e régiment d’infanterie territoriale. Pourquoi, à cette date, le Président a-t-il laissé la Justice suivre son cours ? Quels sont les faits qui ont justifié sa décision ?
Nous sommes en 1920, une des premières lois d’amnistie, celle du 24 octobre 1919 est parue. Beaucoup de soldats vont en bénéficier.
En écrivant au Ministère de la Justice, celui de la Guerre, en demandant son appréciation, précise son intention de demander que la justice suive son cours. Dans sa réponse, le Ministère de la Justice indique que « la Justice suive son cours à l’égard de ce condamné ».
Le sort du soldat Huchet était scellé.
Mais revenons 3 années plus tôt pour découvrir ce cas.
Le 29 novembre 1918, le commissaire spécial adjoint Grégoire, attaché à la sûreté générale de l’état-major de la Direction des étapes du Groupe d’Armée de l’Est, est informé de l’arrivée au centre de triage de Gérardmer, d’un militaire du nom de Laurent signalé comme suspect par ses camarades prisonniers qui viennent d’être libérés.
Le commissaire spécial va interroger ce nommé Laurent et rapidement il va découvrir la « face cachée » de ce militaire qui s’appelle en réalité Huchet Gaston Eugène, soldat du 28e RIT. Il rédigeait son rapport le 29 novembre 1918 avant de le transmettre à son supérieur le 2 décembre 1918.
Le 5 décembre 1918, l’ordre de transfert du soldat Huchet à la prison militaire du Mans était signé. Le 25 décembre, Huchet était écroué à la prison militaire du Mans pour y être interrogé par le capitaine Villers, rapporteur auprès du Conseil de Guerre du 4e Corps d’Armée.
Le 20 juin 1919, à l’issue d’une longue période d’auditions, de commissions rogatoires des différents protagonistes et d’interrogatoires comme en témoignent les nombreuses pièces du dossier, le rapporteur du Conseil de Guerre finissait de rédiger son rapport très instructif, qui résume bien les nombreuses pièces de ce gros dossier :
Le soldat Huchet Gaston Eugène, du 28e RIT, après avoir été condamné, ainsi que le porte son état signalétique, par le conseil de guerre de la 131e Division d’infanterie, le 22 mai 1916, à 8 jours pour ivresse, avait été cassé du grade de caporal. Il fut fait prisonnier le 21 juin 1917. Aussitôt capturé, dit-il, il fut interrogé par un officier allemand à Neuflize et déclare alors n’avoir donné aucun renseignement aux allemands (Huchet - 20)
bien que le soldat Azouley dont il a été impossible de retrouver la trace, ait confié au sergent Kenezi qu’il avait vu Huchet copiant un plan pour l’officier qui l’interrogeait (Kenezi - 42).
Si le fait est exact, on comprendra pourquoi, dès ce moment, Huchet fut envoyé au camp de Rethel comme agent de l’espionnage allemand.
C’est en effet à ce service qu’il semble bien avoir été attaché pendant toute la durée de sa captivité, jusqu’au moment où, à sa rentrée en France, il a été arrêté sur les dénonciations de ses camarades de captivité, que sont venues confirmer l’ensemble des dépositions unanimes de tous ceux qui l’ont connu. Au camp de Rethel, qui avait été établi dans la prison de la ville, et dans lequel il est resté depuis sa capture, en juin 1917, jusqu’en mars 1918, Huchet jouissait de la plus grande liberté et surtout de la plus redoutable autorité auprès de ses camarades prisonniers comme lui. Il partageait les faveurs des Allemands avec un nommé Dardenne (dit Debonnal) ancien caporal nommé adjudant par les Allemands et un ancien cuisinier du nom de Vincent, camarade de capture qu’il n’a pas été possible de retrouver et dont le premier a fait l’objet d’une condamnation à mort par contumace.
Ce trio de bandits, comme les appellent les témoins, s’entendait pour espionner, faire causer, surprendre les secrets et aussi dévaliser et faire souffrir nos prisonniers, en leur infligeant des punitions et en les privant de nourriture.
Huchet, bien que cherchant à rejeter la faute sur ses deux complices, est accusé trop formellement par tous les témoins entendus, pour qu’il ne puisse, dès maintenant, être mis seul en jugement, sans attendre l’arrestation problématique de ses comparses.
Les principales fonctions de Huchet, au camp de Rethel, consistaient surtout à faire de l’espionnage pour le compte des Allemands, en obtenant, par divers procédés qui lui étaient indiqués par les Allemands ou qu’il imaginait lui-même, des renseignements de ses camarades nouvellement faits prisonniers, principalement des esprits faibles (déposition Francoz-218). Dans ce but, il se trouvait comme par hasard dans la cellule du nouvel arrivant (déposition Fournier-89).
Il avait, d’ailleurs, l’accès facile de toutes les cellules qu’il se faisait ouvrir sur un simple signe donné aux sentinelles. Puis, quand la conversation était terminée, il quittait le prisonnier interrogé et allait rapporter les secrets qu’il avait pu surprendre au personnel allemand de la prison. Quelquefois, il encourageait même ses camarades à donner des renseignements à l’officier allemand qui allait procéder à l’interrogatoire et cela sous un prétexte quelconque. C’est ainsi qu’il disait au soldat Trosseau : « vous n’avez pas d’intérêt à cacher quoi que ce soit lorsque vous serez interrogé et à tout indiquer : emplacements d’artillerie, etc...dans votre secteur (déposition Trosseau-88). Huchet, aujourd’hui, ne conteste plus ce dernier fait ; il prétend qu’il faisait alors allusion, en disant cela aux prisonniers, à la reddition d’un sergent qu’il ne nous désigne que sous le nom de Wolf.
La prison de Rethel était d’ailleurs très bien aménagée pour l’espionnage, il le reconnaît également et se contente d’accuser ses deux complices avec lesquels cependant il était au mieux, puisqu’il mangeait avec eux les meilleurs morceaux et avec les Allemands de service à la prison (Francoz-218). Non content d’espionner les prisonniers, il les dévalisait, leur prenant leurs vêtements sous prétexte qu’ils allaient à l’hôpital, et vendait aux Allemands, les capotes ainsi dérobées (francoz-217). Il faisait déposer dans la commode de sa chambre les objets de valeur qu’il engageait les prisonniers à déposer, puis les confisquait à son profit ; c’est ainsi qu’il volait des montres et objets de valeur (déposition Passy-81).
Il prenait ainsi sans raison plausible la meilleure chemise du soldat Trosseau, qui a été au camp de Rethel en 1917 et ce dernier l’accuse formellement pour ce fait précis de vol (cote 88).
Quant au biscuit du secours français qui était adressé à nos prisonniers et qui parvenait au camp de Rethel par l’intermédiaire du sergent Kenezi, il était remis au soldat Huchet, qui était l’homme de confiance choisi par les Allemands. Huchet en avait la garde, mais il le vendait ou le faisait vendre par son acolyte, le cuisinier Vincent, à nos prisonniers qui l’achetaient au lieu de le recevoir gratuitement. Huchet prélevait même, sur cette distribution non gratuite, une part pour les sentinelles allemandes (déposition Glaas-218 bis) (Bierry-85) (Raingnault-104) (Berthelot-113) (Kenezi-42) (Gagnard-76).
Ce fait constitue à sa propre charge un vol militaire bien caractérisé. Huchet prétend que d’accord avec le sergent Kenezi (p 88), il constituait une réserve et explique que c’est pour cette raison qu’il ne distribuait pas les biscuits. Quelquefois, cependant, il distribuait les biscuits qu’il pouvait avoir en trop, sans doute, en les jetant du haut du balcon placé à l’intérieur de la prison, parmi les prisonniers qui, pêle-mêle, étaient obligés de se bousculer pour les ramasser et de se battre pour manger à leur faim. Comme il niait dans une confrontation cette façon méprisable de distribuer le biscuit que la France envoyait à ses prisonniers, le témoin Trosseau (p.88) affirma qu’il l’avait vu agir ainsi plus de dix fois.
À faire ce manège, à voler, à vendre, Huchet avait toujours un portefeuille garni d’argent français et allemand (déposition Kenezi-42) (Mignolet-68) (Bierry-85) et tous les jours il achetait, pour boire avec ses acolytes et les Allemands, le meilleur vin à raison de 15 et 18 marks la bouteille (déposition Francoz-218).
Huchet indique que Dardenne, qui n’était que caporal, avait été nommé adjudant par les boches ; il omet de reconnaître que lui aussi a été désigné par les Allemands comme chef de camp et qu’à partir de cette date, il a porté les galons de sergent vers octobre 1917 (déposition Glaas-218 bis).
Huchet a prétendu que c’était le maire de Rethel, Monsieur Mignolet, qui lui aurait donné les galons de sergent ou tout au moins qui lui aurait donné des galons de sergent à coudre. Ce témoin interrogé nie le fait avec énergie car Huchet n’avait pu être nommé sergent que par les Allemands et non par lui-même. Si une inculpation est relevée pour port illégal d’insignes, c’est surtout parce que Huchet faisait, grâce à ses galons, la discipline au camp avec une autorité telle qu’il en usait contre ses camarades en faisant punir ou en punissant lui-même ceux qui n’étaient pas satisfaits de son attitude (déposition Vigier-211).
Huchet était arrogant et lorsqu’il punissait directement, c’est-à-dire, hors de la présence même des Allemands ce qu’il reconnaît d’ailleurs (p88), il laissait nos prisonniers sans nourriture (déposition Trosseau-88) (Berthelot-113) (Bierry-85) (Chevenant-14)
et s’en vantait au point de dire : « je suis là pour vous embêter, d’accord avec les boches » (Trosseau-88) et lorsque ceux-ci, moins cruels, donnaient un peu de pain, il disait que « s’il ne dépendait que de moi, je ne vous donnerais rien du tout ».
Considéré comme espion à Rethel, il passait pour écrire des articles dans la gazette des Ardennes (déposition Gagnard-76), il s’en est même vanté (déposition sergent Kenezi-42).
Dans sa déposition du 15 février 1919, le soldat Gagnard indiquait : oui, j’ai connu pendant ma captivité du 4 janvier 1918 au mois de juillet de la même année à la prison civile de Rethel, le soldat Huchet qui a été nommé sergent par les Allemands ; je ne l’ai pas connu sous le nom de Laurent. Il ressemblait exactement à la photographie qui m’est représentée ; il ne portait pas la barbe mais seulement la forte moustache retombante telle qu’il la porte sur la photographie.
À la fin, trop connu et dévoilé comme espion, puisque tous ses camarades s’ingéniaient par toutes sortes de ruses, à avertir les nouveaux arrivants de ses agissements, les Allemands le considèrent comme un agent brûlé. C’est alors qu’il fut envoyé sur d’autres fronts pour continuer le même service. On le retrouve à partir de juin 1918 à Colmar, à Mulhouse, sous les noms de sergent Laurent, sergent Huchet ou soldat Huchet, il continue à être chargé de l’interrogatoire des nouveaux prisonniers. C’est lui qui est chargé, dans ces camps, de les interroger à leur arrivée et de rapporter les renseignements qu’il a pu obtenir à l’officier allemand chargé de l’interrogatoire. Généralement, il indique comme à Rethel qu’il était fait prisonnier de la veille (déposition caporal Ballandras-4) (Fraboulet-10) ou il y a deux jours (Mazurier-41) ou il y a huit jours (Vibert-63). De sorte que personne ne pouvait savoir la date exacte de sa capture. Pour empêcher, comme à Rethel, que les anciens prisonniers ne causent avec les nouveaux, il avait soin de les enfermer lui-même dans les cellules dont il détenait les clefs (Ballandras-60). Malgré ces précautions, il est quelquefois déçu, car il est assez à temps indiqué comme suspect avant l’interrogatoire (déposition Durriez-39) (Fraboulet-10).
Néanmoins, il peut souvent obtenir des renseignements utiles qu’il se fait préciser : sur nos avant-postes, sur des renforts américains (Duriez-39), sur l’artillerie et les munitions (déposition Vibert-63)
, sur les positions des batteries, de nos régiments français et américains (Boudet-54) sur le point de savoir si les alliés doivent attaquer Mulhouse (Mazurier-41) (Fraboulet-10).
Il engage, comme à Rethel, les prisonniers à donner le plus de renseignements possible à l’officier allemand qui les interroge (déposition Boudet-5/54).
Beaucoup, naturellement, devant ce prisonnier français, qu’ils croient sincère, bavardent et donnent des renseignements exacts à Huchet, tandis qu’ils donnent de faux renseignements à l’officier allemand qui les interroge. Il est même arrivé que le soldat Mazurie (41)
non averti du manège de Huchet lui a donné, avec confiance, des renseignements de camarade à camarade. A l’interrogatoire de l’officier allemand à Colmar, quelques instants après, comme il ne disait pas la même chose qu’à Huchet à qui il venait de causer, l’officier allemand lui fit observer qu’il ne donnait pas les mêmes ? renseignements que ceux qu’il avait déjà donnés à un militaire. Et Mazurier de conclure tout naturellement que Huchet était certainement un espion, car lui seul avait pu fournir les renseignements exacts, puisqu’il n’en avait parlé qu’à ce faux camarade. C’est pourquoi Mazurier vient d’affirmer qu’il a de ce fait la preuve matérielle que le sergent Huchet a donné des renseignements à l’ennemi.
Au cours de l’instruction, Huchet a été surpris maintes fois en flagrant délit de mensonge. Il a prétendu qu’il ne s’était jamais appelé Laurent (p20) même au premier interrogatoire du 29 janvier 1919 bien que certains témoins, tel que Boudet (p.54) ne l’aient jamais connu que sous le nom de Laurent.
Il a prétendu tout d’abord qu’il n’avait jamais porté les galons de sergent à Rethel, puis se rétractait devant l’évidence des dépositions. Il a prétendu qu’il n’avait jamais été à Mulhouse, bien qu’il y ait été vu (déposition Mazurier-9) puis il l’a reconnu en disant, dans la déposition du 11 février 1919 p 26 qu’il ne se rappelait pas. Il a été surpris en automobile avec des officiers allemands et lorsqu’il était à Colmar, il dissimulait soigneusement ses voyages à Mulhouse en prétendant qu’il était allé démonter des appareils d’aviation dans la direction de Laon.
À Colmar et à Mulhouse, comme à Rethel, il faisait le même métier d’acheter les capotes de soldats prisonniers pour les revendre (déposition Bertrand-7). Là, encore, il était le seul qui fut nourri comme les Allemands, qui sortait seul en ville, qui allait à l’interrogatoire sans être accompagné (Duriez-39), on le voyait même habillé en civil et il fréquentait une femme à laquelle il donnait des colis des prisonniers (déposition Vibert-63).
Huchet prétend qu’il n’a jamais été un agent d’espionnage, il indique d’abord que, s’il a demandé des renseignements, c’était simplement pour se renseigner lui-même ; il ajoute que jamais il n’en a rapporté, puis il reconnaît ensuite qu’il a tout de même donné des renseignements banals sur ce qu’il appelle des points secondaires, c’est-à-dire sur la nourriture des soldats français au front, sur l’état d’esprit des civils, sur le point de savoir s’ils étaient fatigués de la guerre, sur la maladie espagnole. C’est ce qu’il appelle des renseignements sans importance, bien que cependant, il s’agisse de renseignements qui, à eux seuls, motivent l’inculpation d’intelligences avec l’ennemi. Tels sont les seuls aveux qu’il a faits au cours de l’instruction devant le Rapporteur.
Lorsqu’il avait été interrogé le 29 novembre 1918 à sa rentrée en France, il avait fait des aveux plus complets et plus catégoriques ; mais il a prétendu qu’on l’avait fait signer, sans le lui relire, un faux interrogatoire à Gérardmer. Il a affirmé qu’il n’avait été interrogé uniquement que sur son nom, c’est ce qu’il a dit au capitaine Bechot qui commandait le centre de triage de Gérardmer, et ce capitaine qu’il a su apitoyer sur son sort, a même écrit une lettre en sa faveur. A l’instruction du 26 janvier 1919, dans son premier interrogatoire (p.26), il a maintenu formellement que le commissaire de police de Gérardmer qui l’avait interrogé, ne lui avait demandé que son nom ; puis, lorsqu’on lui a indiqué tous les renseignements qui étaient contenus dans cet interrogatoire qui fourmille de détails, que le commissaire de police n’avait pu inventer, il a fini par reconnaître qu’en effet, le commissaire de police lui avait fait un long interrogatoire (11 février 1919-p.26).
Les nombreuses dépositions recueillies à l’instruction démontrent aujourd’hui que les aveux que Huchet avait faits au commissaire de police sont bien le récit réel de tout ce qu’il a fait pendant sa captivité. Pour indiquer son changement de version au sujet de l’interrogatoire du commissaire de police, il se contente de prétendre qu’il était forcé d’agir ainsi et qu’il fallait être indulgent pour lui (déposition du 11 février 1919-p.26).
Il reconnaît que le capitaine allemand Didra à Mulhouse lui a promis des subsides s’il travaillait pour le service de l’espionnage allemand ; il ajoute qu’il ne lui a jamais donné des renseignements qu’il qualifie d’ordre secondaire. Si on lui fait observer qu’il ne devait rien dire, il ajoute : si j’ai donné ces renseignements c’est parce que j’ai été forcé par les Allemands, j’ai même été frappé par le lieutenant Schmidt, il m’a menacé de son révolver. Le lieutenant Schmidt lui aurait reproché de lui avoir fourni de faux renseignements ce qui lui avait attiré un blâme de la part de ses chefs. Il est fort probable que cette fois, il avait donné les renseignements qu’un camarade averti avait eu soin de lui donner inexacts.
L’état d’esprit d’Huchet correspond exactement à ses mauvaises manœuvres. Huchet ne cachait pas sa foi dans la victoire allemande (déposition Boudet-54) (Berthelot-113). Il disait que les Allemands seraient vainqueurs mais qu’au cas où les Français seraient victorieux, M. Caillaux serait toujours là pour l’aider à se tirer d’affaire (Gagnard-76) et il ne se cachait pas vis-à-vis de ses camarades pour tenir ces propos (p.54). Il en comprenait la gravité et la portée ainsi que l’indiquent tous ceux qui ont été interrogés sur ce point (Glaas-218) (Riandée-50) (Ballandras-60) (Gagnard-76) (Raingnault-104) (Berthelot-113) (Chevenaut-114).
Sur la demande de son défenseur, il a été soumis à un examen médical et dans son rapport, le docteur Camus (médecin de la Salpêtrière et médecin-chef de Psychiatrie de la 4e Région Militaire) conclut à son entière responsabilité. On constate même dans le rapport du praticien l’aveu des faits d’intelligences avec l’ennemi que lui a fait Huchet lorsqu’il lui a dit que s’il a fait cela, c’est parce qu’il était forcé, c’est par la peur des boches.
Huchet a été condamné à 8 jours de prison pour ivresse. Avant d’être rappelé à la mobilisation, les renseignements fournis sur lui à Deauville lui sont des plus défavorables au point de vue de la probité.
En conséquence, le rapporteur estima qu’il a lieu de mettre en jugement le soldat Huchet du 28e RIT sous les inculpations de :
1-intelligences avec l’ennemi pour avoir, en 1917 et 1918, à Rethel, dans divers lieux occupés par les Allemands en arrière du front, donné à l’ennemi, dans le but de favoriser ses entreprises, des renseignements intéressant la défense nationale.
2-de vols militaires pour avoir aux mêmes dates et lieux, volé du biscuit destiné aux prisonniers de guerre au préjudice de l’État et volé une chemise au préjudice du soldat Trousseau.
3-de port illégal d’insignes pour avoir aux mêmes dates et lieux, porté illégalement l’insigne du grade de sergent.
Crimes et délits prévus et réprimés par les articles 205, 248 et 266 du code de justice militaire.
Huchet avait été employé au chemin de fer mais il s’était fait révoquer. Il avait également été employé par l’administration des eaux de Deauville, mais avait été également révoqué.
Le 21 juin 1919, l’instruction terminée, le commissaire du gouvernement adressait son rapport au général commandant la 4e Région militaire en demandant la mise en jugement du soldat Huchet.
Le 4 juillet 1919, au vu du rapport, de l’avis et des conclusions du commissaire du gouvernement, le général commandant la 4e Région militaire a ordonné la mise en jugement du soldat Huchet et la convocation du conseil de guerre pour le 22 juillet 1919.
Le 17 juillet 1919, le commissaire auprès du gouvernement donnait au soldat Huchet, la citation directe afin de comparaître à l’audience ordonnée par le général commandant la 4e Région militaire pour le 22 juillet à 13h30. Treize témoins étaient assignés contre Huchet. Le commandant du dépôt du 28e précisait que le soldat Huchet n’avait, à sa connaissance, fait l’objet d’aucune citation. Huchet avait été cassé de son grade de caporal le 22 mai 1916 et remis simple soldat de 2e classe.
Le 22 juillet 1919, le conseil de guerre permanent de la 4e Région militaire s’était réuni :
Le soldat Huchet était défendu par Monsieur Bouvier avocat au Mans.
À l’unanimité, sur les 4 questions posées aux juges du conseil de guerre, ces derniers ont déclaré Huchet coupable et l’avaient condamné à mort. Les juges ont également déclaré qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur du soldat Huchet.
Le soldat Huchet s’était pourvu en révision le 23 juillet 1919.
Le conseil de révision s’était réuni le 12 août 1919. Sa composition est conforme au décret du 28 avril 1916 avec 2 conseillers de la cour d’appel de Paris dont l’un est Président de droit du conseil de révision.
La mise à disposition de la procédure au conseil (il faut comprendre la mise à disposition de la procédure à l’avocat commis d’office ou choisi) dans les 24 heures avant la clôture de l’information a peut-être été faite mais comme aucune pièce n’est là pour le constater, la nullité du jugement a été prononcée.
Le jugement a été renvoyé devant le conseil de guerre de la 5e Région militaire.
Le 30 août 1919, le soldat Huchet a été transféré à la prison militaire d’Orléans.
Le 10 septembre 1919, le capitaine Bidet, rapporteur auprès du conseil de guerre permanent de la 5e Région militaire, informait Maître Bouvier, avocat au Mans et défenseur du soldat Huchet, qu’il clôturerait l’instruction le 18 septembre, que la procédure sera mise à sa disposition dans les 24 heures.
Le 4 octobre 1919, vu le rapport et l’avis du capitaine Bidet, rapporteur et les conclusions du capitaine Graud commissaire du gouvernement tendant à renvoyer le soldat Huchet devant le conseil de guerre, le général commandant la 5e Région militaire a ordonné la mise en jugement de Huchet et sa comparution devant le conseil de guerre pour le 31 octobre 1919.
Le 31 octobre 1919, le conseil de guerre de la 5e Région militaire s’était réuni pour statuer sur le sort du soldat Huchet.
À l’unanimité, les juges du conseil de guerre permanent de la 5e Région militaire ont condamné à la peine de mort le soldat Huchet en application des articles 205, 248, 135 et 189 du code de justice militaire.
Le 4 décembre 1919, la Cour de Cassation, qui se substitue en temps de paix au conseil de révision depuis la loi de 17 avril 1906, a rejeté le recours en cassation présenté par le soldat Huchet. En effet, les procédures entre les 2 jugements sont quelque peu différentes, ce qui s’explique par la parution au JO du 24 octobre 1919 de la loi du 23 octobre 1919, qui acte la cessation des hostilités et donc de l’état de guerre. Dès lors, conformément à la loi de 1906, les pourvois en révision sont devenus des pourvois en cassation.
Comme nous l’avons vu au début de cet article, le Président de la République a rejeté le recours en grâce présenté par ce militaire, le ministre de la guerre estimant que « la justice doit suivre son cours ». Prisonnier en Allemagne, il s’est entièrement mis à la disposition pour obtenir de ses camarades tous les renseignements d’ordre militaire qu’ils pouvaient connaître. S’étant revêtu sans droit des insignes du grade de sergent, il s’est ingénié à décourager nos prisonniers, à les torturer et à leur voler les vivres qui leur étaient destinés.
Le 30 janvier 1920, Huchet a été passé par les armes devant les troupes.
À l’issue du conflit, on s’attendait à trouver beaucoup de jugements concernant les contumaces. Car les listes de militaires condamnés du fait de leur capture, comme le précise le courrier du général commandant la 14e Région militaire, existaient bien. Le général entendait, sous ce vocable, les militaires condamnés à mort par contumace pour désertion à l’ennemi.
Entre le premier interrogatoire effectué par le commissaire spécial Grégoire et le 1er jugement, il s’est écoulé près de 7 mois ; on est bien loin des jugements « express » des conseils de guerre temporaires du début juin 1917. Il faut de toute façon souligner que les conseils de guerre permanents, même en temps de guerre, n’ont jamais fait preuve d’une extrême célérité.
Que retenir des nombreux témoignages des militaires qui ont eu à côtoyer Huchet ? On retrouve très souvent les mêmes indications.
Le soldat Chevenaut soulignait : Huchet ne cherchait qu’à nous faire punir ou j’ai toujours eu l’impression qu’il était très heureux lorsque les opérations des Allemands réussissaient. C’est également le cas du soldat Berthelot : cela lui faisait plutôt plaisir lorsque les opérations ne réussissaient pas en notre faveur. Pour le peu que nous répondions à ses propos, il nous mettait en cellule.
La plupart des soldats ne sont pas en mesure d’apporter de preuve des vols imputés à Huchet ce qui est compréhensible, car la plupart n’ont pas reçu d’argent du comité de secours de Rethel qui pourtant distribuait régulièrement, d’après le Maire de Rethel et son comptable, des sommes d’argent sous forme de billets qui étaient exclusivement reçues par Huchet.
Plusieurs de ces billets ont été retrouvés sur Huchet. Une liste de ces versements qui a été fournie par la mairie de Rethel, est annexée au dossier. Elle montre 33 versements effectués théoriquement aux prisonniers pour 20 francs à chaque prisonnier du 9 janvier 1918 au 25 mars 1918.
Huchet s’est défendu en minimisant largement son rôle mais tous ceux qui l’ont côtoyé à Rethel, Colmar ou Mulhouse, l’accusent formellement.
Huchet n’était pas seul de ce type dans cette «entreprise», Dardenne adjudant au 214e RI et le cuisinier Vincent agissaient de concert, la bonne partie des témoignages va dans ce sens.
Il est fort possible que d’autres militaires aient eu des attitudes similaires durant ce conflit, sont-ils passés au travers des mailles des filets de la sûreté ?
Contrairement aux personnes chargées de la numérisation des dossiers des fusillés, le cas du soldat Huchet archivé au dépôt central d'archives de la Justice Militaire, n’avait pas échappé au Prisme, et là aussi, encore une fois et cela ne sera pas la dernière, on ne peut que redire la grosse faute commise par les autorités en évinçant le général Bach du projet de mise en ligne des dossiers de fusillés.
Nous sommes très loin des classiques abandons de poste en présence de l’ennemi ou des refus d’obéissance pour marcher contre l’ennemi, mais ce cas fait partie de la grande diversité des condamnés à mort et fusillés.
Prisme a pris le parti de reproduire le rapport du rapporteur illustré de quelques extraits, livrant ainsi ce texte à la réflexion de chacun, en y ajoutant seulement quelques considérations "techniques" sur le fonctionnement de la Justice Militaire.
Prisme poursuit ses recherches sur la Justice Militaire, son évolution, le sort réservé aux condamnés à mort en continuant à déconstruire les mythes qui s’étaient agglomérés depuis longtemps autour de ces événements tragiques.
Le sort du soldat Huchet était scellé.
Mais revenons 3 années plus tôt pour découvrir ce cas.
Le 29 novembre 1918, le commissaire spécial adjoint Grégoire, attaché à la sûreté générale de l’état-major de la Direction des étapes du Groupe d’Armée de l’Est, est informé de l’arrivée au centre de triage de Gérardmer, d’un militaire du nom de Laurent signalé comme suspect par ses camarades prisonniers qui viennent d’être libérés.
Le commissaire spécial va interroger ce nommé Laurent et rapidement il va découvrir la « face cachée » de ce militaire qui s’appelle en réalité Huchet Gaston Eugène, soldat du 28e RIT. Il rédigeait son rapport le 29 novembre 1918 avant de le transmettre à son supérieur le 2 décembre 1918.
Le 5 décembre 1918, l’ordre de transfert du soldat Huchet à la prison militaire du Mans était signé. Le 25 décembre, Huchet était écroué à la prison militaire du Mans pour y être interrogé par le capitaine Villers, rapporteur auprès du Conseil de Guerre du 4e Corps d’Armée.
Le 20 juin 1919, à l’issue d’une longue période d’auditions, de commissions rogatoires des différents protagonistes et d’interrogatoires comme en témoignent les nombreuses pièces du dossier, le rapporteur du Conseil de Guerre finissait de rédiger son rapport très instructif, qui résume bien les nombreuses pièces de ce gros dossier :
Le soldat Huchet Gaston Eugène, du 28e RIT, après avoir été condamné, ainsi que le porte son état signalétique, par le conseil de guerre de la 131e Division d’infanterie, le 22 mai 1916, à 8 jours pour ivresse, avait été cassé du grade de caporal. Il fut fait prisonnier le 21 juin 1917. Aussitôt capturé, dit-il, il fut interrogé par un officier allemand à Neuflize et déclare alors n’avoir donné aucun renseignement aux allemands (Huchet - 20)
bien que le soldat Azouley dont il a été impossible de retrouver la trace, ait confié au sergent Kenezi qu’il avait vu Huchet copiant un plan pour l’officier qui l’interrogeait (Kenezi - 42).
Si le fait est exact, on comprendra pourquoi, dès ce moment, Huchet fut envoyé au camp de Rethel comme agent de l’espionnage allemand.
C’est en effet à ce service qu’il semble bien avoir été attaché pendant toute la durée de sa captivité, jusqu’au moment où, à sa rentrée en France, il a été arrêté sur les dénonciations de ses camarades de captivité, que sont venues confirmer l’ensemble des dépositions unanimes de tous ceux qui l’ont connu. Au camp de Rethel, qui avait été établi dans la prison de la ville, et dans lequel il est resté depuis sa capture, en juin 1917, jusqu’en mars 1918, Huchet jouissait de la plus grande liberté et surtout de la plus redoutable autorité auprès de ses camarades prisonniers comme lui. Il partageait les faveurs des Allemands avec un nommé Dardenne (dit Debonnal) ancien caporal nommé adjudant par les Allemands et un ancien cuisinier du nom de Vincent, camarade de capture qu’il n’a pas été possible de retrouver et dont le premier a fait l’objet d’une condamnation à mort par contumace.
Ce trio de bandits, comme les appellent les témoins, s’entendait pour espionner, faire causer, surprendre les secrets et aussi dévaliser et faire souffrir nos prisonniers, en leur infligeant des punitions et en les privant de nourriture.
Huchet, bien que cherchant à rejeter la faute sur ses deux complices, est accusé trop formellement par tous les témoins entendus, pour qu’il ne puisse, dès maintenant, être mis seul en jugement, sans attendre l’arrestation problématique de ses comparses.
Les principales fonctions de Huchet, au camp de Rethel, consistaient surtout à faire de l’espionnage pour le compte des Allemands, en obtenant, par divers procédés qui lui étaient indiqués par les Allemands ou qu’il imaginait lui-même, des renseignements de ses camarades nouvellement faits prisonniers, principalement des esprits faibles (déposition Francoz-218). Dans ce but, il se trouvait comme par hasard dans la cellule du nouvel arrivant (déposition Fournier-89).
Il avait, d’ailleurs, l’accès facile de toutes les cellules qu’il se faisait ouvrir sur un simple signe donné aux sentinelles. Puis, quand la conversation était terminée, il quittait le prisonnier interrogé et allait rapporter les secrets qu’il avait pu surprendre au personnel allemand de la prison. Quelquefois, il encourageait même ses camarades à donner des renseignements à l’officier allemand qui allait procéder à l’interrogatoire et cela sous un prétexte quelconque. C’est ainsi qu’il disait au soldat Trosseau : « vous n’avez pas d’intérêt à cacher quoi que ce soit lorsque vous serez interrogé et à tout indiquer : emplacements d’artillerie, etc...dans votre secteur (déposition Trosseau-88). Huchet, aujourd’hui, ne conteste plus ce dernier fait ; il prétend qu’il faisait alors allusion, en disant cela aux prisonniers, à la reddition d’un sergent qu’il ne nous désigne que sous le nom de Wolf.
La prison de Rethel était d’ailleurs très bien aménagée pour l’espionnage, il le reconnaît également et se contente d’accuser ses deux complices avec lesquels cependant il était au mieux, puisqu’il mangeait avec eux les meilleurs morceaux et avec les Allemands de service à la prison (Francoz-218). Non content d’espionner les prisonniers, il les dévalisait, leur prenant leurs vêtements sous prétexte qu’ils allaient à l’hôpital, et vendait aux Allemands, les capotes ainsi dérobées (francoz-217). Il faisait déposer dans la commode de sa chambre les objets de valeur qu’il engageait les prisonniers à déposer, puis les confisquait à son profit ; c’est ainsi qu’il volait des montres et objets de valeur (déposition Passy-81).
Il prenait ainsi sans raison plausible la meilleure chemise du soldat Trosseau, qui a été au camp de Rethel en 1917 et ce dernier l’accuse formellement pour ce fait précis de vol (cote 88).
Quant au biscuit du secours français qui était adressé à nos prisonniers et qui parvenait au camp de Rethel par l’intermédiaire du sergent Kenezi, il était remis au soldat Huchet, qui était l’homme de confiance choisi par les Allemands. Huchet en avait la garde, mais il le vendait ou le faisait vendre par son acolyte, le cuisinier Vincent, à nos prisonniers qui l’achetaient au lieu de le recevoir gratuitement. Huchet prélevait même, sur cette distribution non gratuite, une part pour les sentinelles allemandes (déposition Glaas-218 bis) (Bierry-85) (Raingnault-104) (Berthelot-113) (Kenezi-42) (Gagnard-76).
Ce fait constitue à sa propre charge un vol militaire bien caractérisé. Huchet prétend que d’accord avec le sergent Kenezi (p 88), il constituait une réserve et explique que c’est pour cette raison qu’il ne distribuait pas les biscuits. Quelquefois, cependant, il distribuait les biscuits qu’il pouvait avoir en trop, sans doute, en les jetant du haut du balcon placé à l’intérieur de la prison, parmi les prisonniers qui, pêle-mêle, étaient obligés de se bousculer pour les ramasser et de se battre pour manger à leur faim. Comme il niait dans une confrontation cette façon méprisable de distribuer le biscuit que la France envoyait à ses prisonniers, le témoin Trosseau (p.88) affirma qu’il l’avait vu agir ainsi plus de dix fois.
À faire ce manège, à voler, à vendre, Huchet avait toujours un portefeuille garni d’argent français et allemand (déposition Kenezi-42) (Mignolet-68) (Bierry-85) et tous les jours il achetait, pour boire avec ses acolytes et les Allemands, le meilleur vin à raison de 15 et 18 marks la bouteille (déposition Francoz-218).
Huchet indique que Dardenne, qui n’était que caporal, avait été nommé adjudant par les boches ; il omet de reconnaître que lui aussi a été désigné par les Allemands comme chef de camp et qu’à partir de cette date, il a porté les galons de sergent vers octobre 1917 (déposition Glaas-218 bis).
Huchet a prétendu que c’était le maire de Rethel, Monsieur Mignolet, qui lui aurait donné les galons de sergent ou tout au moins qui lui aurait donné des galons de sergent à coudre. Ce témoin interrogé nie le fait avec énergie car Huchet n’avait pu être nommé sergent que par les Allemands et non par lui-même. Si une inculpation est relevée pour port illégal d’insignes, c’est surtout parce que Huchet faisait, grâce à ses galons, la discipline au camp avec une autorité telle qu’il en usait contre ses camarades en faisant punir ou en punissant lui-même ceux qui n’étaient pas satisfaits de son attitude (déposition Vigier-211).
Huchet était arrogant et lorsqu’il punissait directement, c’est-à-dire, hors de la présence même des Allemands ce qu’il reconnaît d’ailleurs (p88), il laissait nos prisonniers sans nourriture (déposition Trosseau-88) (Berthelot-113) (Bierry-85) (Chevenant-14)
et s’en vantait au point de dire : « je suis là pour vous embêter, d’accord avec les boches » (Trosseau-88) et lorsque ceux-ci, moins cruels, donnaient un peu de pain, il disait que « s’il ne dépendait que de moi, je ne vous donnerais rien du tout ».
Considéré comme espion à Rethel, il passait pour écrire des articles dans la gazette des Ardennes (déposition Gagnard-76), il s’en est même vanté (déposition sergent Kenezi-42).
Dans sa déposition du 15 février 1919, le soldat Gagnard indiquait : oui, j’ai connu pendant ma captivité du 4 janvier 1918 au mois de juillet de la même année à la prison civile de Rethel, le soldat Huchet qui a été nommé sergent par les Allemands ; je ne l’ai pas connu sous le nom de Laurent. Il ressemblait exactement à la photographie qui m’est représentée ; il ne portait pas la barbe mais seulement la forte moustache retombante telle qu’il la porte sur la photographie.
À la fin, trop connu et dévoilé comme espion, puisque tous ses camarades s’ingéniaient par toutes sortes de ruses, à avertir les nouveaux arrivants de ses agissements, les Allemands le considèrent comme un agent brûlé. C’est alors qu’il fut envoyé sur d’autres fronts pour continuer le même service. On le retrouve à partir de juin 1918 à Colmar, à Mulhouse, sous les noms de sergent Laurent, sergent Huchet ou soldat Huchet, il continue à être chargé de l’interrogatoire des nouveaux prisonniers. C’est lui qui est chargé, dans ces camps, de les interroger à leur arrivée et de rapporter les renseignements qu’il a pu obtenir à l’officier allemand chargé de l’interrogatoire. Généralement, il indique comme à Rethel qu’il était fait prisonnier de la veille (déposition caporal Ballandras-4) (Fraboulet-10) ou il y a deux jours (Mazurier-41) ou il y a huit jours (Vibert-63). De sorte que personne ne pouvait savoir la date exacte de sa capture. Pour empêcher, comme à Rethel, que les anciens prisonniers ne causent avec les nouveaux, il avait soin de les enfermer lui-même dans les cellules dont il détenait les clefs (Ballandras-60). Malgré ces précautions, il est quelquefois déçu, car il est assez à temps indiqué comme suspect avant l’interrogatoire (déposition Durriez-39) (Fraboulet-10).
Néanmoins, il peut souvent obtenir des renseignements utiles qu’il se fait préciser : sur nos avant-postes, sur des renforts américains (Duriez-39), sur l’artillerie et les munitions (déposition Vibert-63)
, sur les positions des batteries, de nos régiments français et américains (Boudet-54) sur le point de savoir si les alliés doivent attaquer Mulhouse (Mazurier-41) (Fraboulet-10).
Il engage, comme à Rethel, les prisonniers à donner le plus de renseignements possible à l’officier allemand qui les interroge (déposition Boudet-5/54).
Beaucoup, naturellement, devant ce prisonnier français, qu’ils croient sincère, bavardent et donnent des renseignements exacts à Huchet, tandis qu’ils donnent de faux renseignements à l’officier allemand qui les interroge. Il est même arrivé que le soldat Mazurie (41)
non averti du manège de Huchet lui a donné, avec confiance, des renseignements de camarade à camarade. A l’interrogatoire de l’officier allemand à Colmar, quelques instants après, comme il ne disait pas la même chose qu’à Huchet à qui il venait de causer, l’officier allemand lui fit observer qu’il ne donnait pas les mêmes ? renseignements que ceux qu’il avait déjà donnés à un militaire. Et Mazurier de conclure tout naturellement que Huchet était certainement un espion, car lui seul avait pu fournir les renseignements exacts, puisqu’il n’en avait parlé qu’à ce faux camarade. C’est pourquoi Mazurier vient d’affirmer qu’il a de ce fait la preuve matérielle que le sergent Huchet a donné des renseignements à l’ennemi.
Au cours de l’instruction, Huchet a été surpris maintes fois en flagrant délit de mensonge. Il a prétendu qu’il ne s’était jamais appelé Laurent (p20) même au premier interrogatoire du 29 janvier 1919 bien que certains témoins, tel que Boudet (p.54) ne l’aient jamais connu que sous le nom de Laurent.
Il a prétendu tout d’abord qu’il n’avait jamais porté les galons de sergent à Rethel, puis se rétractait devant l’évidence des dépositions. Il a prétendu qu’il n’avait jamais été à Mulhouse, bien qu’il y ait été vu (déposition Mazurier-9) puis il l’a reconnu en disant, dans la déposition du 11 février 1919 p 26 qu’il ne se rappelait pas. Il a été surpris en automobile avec des officiers allemands et lorsqu’il était à Colmar, il dissimulait soigneusement ses voyages à Mulhouse en prétendant qu’il était allé démonter des appareils d’aviation dans la direction de Laon.
À Colmar et à Mulhouse, comme à Rethel, il faisait le même métier d’acheter les capotes de soldats prisonniers pour les revendre (déposition Bertrand-7). Là, encore, il était le seul qui fut nourri comme les Allemands, qui sortait seul en ville, qui allait à l’interrogatoire sans être accompagné (Duriez-39), on le voyait même habillé en civil et il fréquentait une femme à laquelle il donnait des colis des prisonniers (déposition Vibert-63).
Huchet prétend qu’il n’a jamais été un agent d’espionnage, il indique d’abord que, s’il a demandé des renseignements, c’était simplement pour se renseigner lui-même ; il ajoute que jamais il n’en a rapporté, puis il reconnaît ensuite qu’il a tout de même donné des renseignements banals sur ce qu’il appelle des points secondaires, c’est-à-dire sur la nourriture des soldats français au front, sur l’état d’esprit des civils, sur le point de savoir s’ils étaient fatigués de la guerre, sur la maladie espagnole. C’est ce qu’il appelle des renseignements sans importance, bien que cependant, il s’agisse de renseignements qui, à eux seuls, motivent l’inculpation d’intelligences avec l’ennemi. Tels sont les seuls aveux qu’il a faits au cours de l’instruction devant le Rapporteur.
Lorsqu’il avait été interrogé le 29 novembre 1918 à sa rentrée en France, il avait fait des aveux plus complets et plus catégoriques ; mais il a prétendu qu’on l’avait fait signer, sans le lui relire, un faux interrogatoire à Gérardmer. Il a affirmé qu’il n’avait été interrogé uniquement que sur son nom, c’est ce qu’il a dit au capitaine Bechot qui commandait le centre de triage de Gérardmer, et ce capitaine qu’il a su apitoyer sur son sort, a même écrit une lettre en sa faveur. A l’instruction du 26 janvier 1919, dans son premier interrogatoire (p.26), il a maintenu formellement que le commissaire de police de Gérardmer qui l’avait interrogé, ne lui avait demandé que son nom ; puis, lorsqu’on lui a indiqué tous les renseignements qui étaient contenus dans cet interrogatoire qui fourmille de détails, que le commissaire de police n’avait pu inventer, il a fini par reconnaître qu’en effet, le commissaire de police lui avait fait un long interrogatoire (11 février 1919-p.26).
Les nombreuses dépositions recueillies à l’instruction démontrent aujourd’hui que les aveux que Huchet avait faits au commissaire de police sont bien le récit réel de tout ce qu’il a fait pendant sa captivité. Pour indiquer son changement de version au sujet de l’interrogatoire du commissaire de police, il se contente de prétendre qu’il était forcé d’agir ainsi et qu’il fallait être indulgent pour lui (déposition du 11 février 1919-p.26).
Il reconnaît que le capitaine allemand Didra à Mulhouse lui a promis des subsides s’il travaillait pour le service de l’espionnage allemand ; il ajoute qu’il ne lui a jamais donné des renseignements qu’il qualifie d’ordre secondaire. Si on lui fait observer qu’il ne devait rien dire, il ajoute : si j’ai donné ces renseignements c’est parce que j’ai été forcé par les Allemands, j’ai même été frappé par le lieutenant Schmidt, il m’a menacé de son révolver. Le lieutenant Schmidt lui aurait reproché de lui avoir fourni de faux renseignements ce qui lui avait attiré un blâme de la part de ses chefs. Il est fort probable que cette fois, il avait donné les renseignements qu’un camarade averti avait eu soin de lui donner inexacts.
L’état d’esprit d’Huchet correspond exactement à ses mauvaises manœuvres. Huchet ne cachait pas sa foi dans la victoire allemande (déposition Boudet-54) (Berthelot-113). Il disait que les Allemands seraient vainqueurs mais qu’au cas où les Français seraient victorieux, M. Caillaux serait toujours là pour l’aider à se tirer d’affaire (Gagnard-76) et il ne se cachait pas vis-à-vis de ses camarades pour tenir ces propos (p.54). Il en comprenait la gravité et la portée ainsi que l’indiquent tous ceux qui ont été interrogés sur ce point (Glaas-218) (Riandée-50) (Ballandras-60) (Gagnard-76) (Raingnault-104) (Berthelot-113) (Chevenaut-114).
Sur la demande de son défenseur, il a été soumis à un examen médical et dans son rapport, le docteur Camus (médecin de la Salpêtrière et médecin-chef de Psychiatrie de la 4e Région Militaire) conclut à son entière responsabilité. On constate même dans le rapport du praticien l’aveu des faits d’intelligences avec l’ennemi que lui a fait Huchet lorsqu’il lui a dit que s’il a fait cela, c’est parce qu’il était forcé, c’est par la peur des boches.
Huchet a été condamné à 8 jours de prison pour ivresse. Avant d’être rappelé à la mobilisation, les renseignements fournis sur lui à Deauville lui sont des plus défavorables au point de vue de la probité.
En conséquence, le rapporteur estima qu’il a lieu de mettre en jugement le soldat Huchet du 28e RIT sous les inculpations de :
1-intelligences avec l’ennemi pour avoir, en 1917 et 1918, à Rethel, dans divers lieux occupés par les Allemands en arrière du front, donné à l’ennemi, dans le but de favoriser ses entreprises, des renseignements intéressant la défense nationale.
2-de vols militaires pour avoir aux mêmes dates et lieux, volé du biscuit destiné aux prisonniers de guerre au préjudice de l’État et volé une chemise au préjudice du soldat Trousseau.
3-de port illégal d’insignes pour avoir aux mêmes dates et lieux, porté illégalement l’insigne du grade de sergent.
Crimes et délits prévus et réprimés par les articles 205, 248 et 266 du code de justice militaire.
Huchet avait été employé au chemin de fer mais il s’était fait révoquer. Il avait également été employé par l’administration des eaux de Deauville, mais avait été également révoqué.
Le 21 juin 1919, l’instruction terminée, le commissaire du gouvernement adressait son rapport au général commandant la 4e Région militaire en demandant la mise en jugement du soldat Huchet.
Le 4 juillet 1919, au vu du rapport, de l’avis et des conclusions du commissaire du gouvernement, le général commandant la 4e Région militaire a ordonné la mise en jugement du soldat Huchet et la convocation du conseil de guerre pour le 22 juillet 1919.
Le 17 juillet 1919, le commissaire auprès du gouvernement donnait au soldat Huchet, la citation directe afin de comparaître à l’audience ordonnée par le général commandant la 4e Région militaire pour le 22 juillet à 13h30. Treize témoins étaient assignés contre Huchet. Le commandant du dépôt du 28e précisait que le soldat Huchet n’avait, à sa connaissance, fait l’objet d’aucune citation. Huchet avait été cassé de son grade de caporal le 22 mai 1916 et remis simple soldat de 2e classe.
Le 22 juillet 1919, le conseil de guerre permanent de la 4e Région militaire s’était réuni :
Le soldat Huchet était défendu par Monsieur Bouvier avocat au Mans.
À l’unanimité, sur les 4 questions posées aux juges du conseil de guerre, ces derniers ont déclaré Huchet coupable et l’avaient condamné à mort. Les juges ont également déclaré qu’il n’existait pas de circonstances atténuantes en faveur du soldat Huchet.
Le soldat Huchet s’était pourvu en révision le 23 juillet 1919.
Le conseil de révision s’était réuni le 12 août 1919. Sa composition est conforme au décret du 28 avril 1916 avec 2 conseillers de la cour d’appel de Paris dont l’un est Président de droit du conseil de révision.
La mise à disposition de la procédure au conseil (il faut comprendre la mise à disposition de la procédure à l’avocat commis d’office ou choisi) dans les 24 heures avant la clôture de l’information a peut-être été faite mais comme aucune pièce n’est là pour le constater, la nullité du jugement a été prononcée.
Le jugement a été renvoyé devant le conseil de guerre de la 5e Région militaire.
Le 30 août 1919, le soldat Huchet a été transféré à la prison militaire d’Orléans.
Le 10 septembre 1919, le capitaine Bidet, rapporteur auprès du conseil de guerre permanent de la 5e Région militaire, informait Maître Bouvier, avocat au Mans et défenseur du soldat Huchet, qu’il clôturerait l’instruction le 18 septembre, que la procédure sera mise à sa disposition dans les 24 heures.
Le 4 octobre 1919, vu le rapport et l’avis du capitaine Bidet, rapporteur et les conclusions du capitaine Graud commissaire du gouvernement tendant à renvoyer le soldat Huchet devant le conseil de guerre, le général commandant la 5e Région militaire a ordonné la mise en jugement de Huchet et sa comparution devant le conseil de guerre pour le 31 octobre 1919.
Le 31 octobre 1919, le conseil de guerre de la 5e Région militaire s’était réuni pour statuer sur le sort du soldat Huchet.
À l’unanimité, les juges du conseil de guerre permanent de la 5e Région militaire ont condamné à la peine de mort le soldat Huchet en application des articles 205, 248, 135 et 189 du code de justice militaire.
Le 4 décembre 1919, la Cour de Cassation, qui se substitue en temps de paix au conseil de révision depuis la loi de 17 avril 1906, a rejeté le recours en cassation présenté par le soldat Huchet. En effet, les procédures entre les 2 jugements sont quelque peu différentes, ce qui s’explique par la parution au JO du 24 octobre 1919 de la loi du 23 octobre 1919, qui acte la cessation des hostilités et donc de l’état de guerre. Dès lors, conformément à la loi de 1906, les pourvois en révision sont devenus des pourvois en cassation.
Comme nous l’avons vu au début de cet article, le Président de la République a rejeté le recours en grâce présenté par ce militaire, le ministre de la guerre estimant que « la justice doit suivre son cours ». Prisonnier en Allemagne, il s’est entièrement mis à la disposition pour obtenir de ses camarades tous les renseignements d’ordre militaire qu’ils pouvaient connaître. S’étant revêtu sans droit des insignes du grade de sergent, il s’est ingénié à décourager nos prisonniers, à les torturer et à leur voler les vivres qui leur étaient destinés.
Le 30 janvier 1920, Huchet a été passé par les armes devant les troupes.
À l’issue du conflit, on s’attendait à trouver beaucoup de jugements concernant les contumaces. Car les listes de militaires condamnés du fait de leur capture, comme le précise le courrier du général commandant la 14e Région militaire, existaient bien. Le général entendait, sous ce vocable, les militaires condamnés à mort par contumace pour désertion à l’ennemi.
Entre le premier interrogatoire effectué par le commissaire spécial Grégoire et le 1er jugement, il s’est écoulé près de 7 mois ; on est bien loin des jugements « express » des conseils de guerre temporaires du début juin 1917. Il faut de toute façon souligner que les conseils de guerre permanents, même en temps de guerre, n’ont jamais fait preuve d’une extrême célérité.
Que retenir des nombreux témoignages des militaires qui ont eu à côtoyer Huchet ? On retrouve très souvent les mêmes indications.
Le soldat Chevenaut soulignait : Huchet ne cherchait qu’à nous faire punir ou j’ai toujours eu l’impression qu’il était très heureux lorsque les opérations des Allemands réussissaient. C’est également le cas du soldat Berthelot : cela lui faisait plutôt plaisir lorsque les opérations ne réussissaient pas en notre faveur. Pour le peu que nous répondions à ses propos, il nous mettait en cellule.
La plupart des soldats ne sont pas en mesure d’apporter de preuve des vols imputés à Huchet ce qui est compréhensible, car la plupart n’ont pas reçu d’argent du comité de secours de Rethel qui pourtant distribuait régulièrement, d’après le Maire de Rethel et son comptable, des sommes d’argent sous forme de billets qui étaient exclusivement reçues par Huchet.
Plusieurs de ces billets ont été retrouvés sur Huchet. Une liste de ces versements qui a été fournie par la mairie de Rethel, est annexée au dossier. Elle montre 33 versements effectués théoriquement aux prisonniers pour 20 francs à chaque prisonnier du 9 janvier 1918 au 25 mars 1918.
Huchet s’est défendu en minimisant largement son rôle mais tous ceux qui l’ont côtoyé à Rethel, Colmar ou Mulhouse, l’accusent formellement.
Huchet n’était pas seul de ce type dans cette «entreprise», Dardenne adjudant au 214e RI et le cuisinier Vincent agissaient de concert, la bonne partie des témoignages va dans ce sens.
Il est fort possible que d’autres militaires aient eu des attitudes similaires durant ce conflit, sont-ils passés au travers des mailles des filets de la sûreté ?
Contrairement aux personnes chargées de la numérisation des dossiers des fusillés, le cas du soldat Huchet archivé au dépôt central d'archives de la Justice Militaire, n’avait pas échappé au Prisme, et là aussi, encore une fois et cela ne sera pas la dernière, on ne peut que redire la grosse faute commise par les autorités en évinçant le général Bach du projet de mise en ligne des dossiers de fusillés.
Nous sommes très loin des classiques abandons de poste en présence de l’ennemi ou des refus d’obéissance pour marcher contre l’ennemi, mais ce cas fait partie de la grande diversité des condamnés à mort et fusillés.
Prisme a pris le parti de reproduire le rapport du rapporteur illustré de quelques extraits, livrant ainsi ce texte à la réflexion de chacun, en y ajoutant seulement quelques considérations "techniques" sur le fonctionnement de la Justice Militaire.
Prisme poursuit ses recherches sur la Justice Militaire, son évolution, le sort réservé aux condamnés à mort en continuant à déconstruire les mythes qui s’étaient agglomérés depuis longtemps autour de ces événements tragiques.
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